Résumé :
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Les termes et les concepts d'usage ordinaire dans l'espace public - celui traversé par les discours politiques, les « débats de société » et parfois des sciences humaines - ne nous étonnent plus, même dans leur renouvellement perpétuel. Ils nous paraissent aller de soi, coller à l'état du monde et nous permettre de décrire les problèmes et les enjeux d'un monde toujours plus complexe. Nous sommes ainsi devenus familiers avec le multiculturalisme et ses relations complexes avec la citoyenneté et la nation, avec les oppositions apparemment évidentes entre le corporatisme et le dévouement ou entre la civilisation et la race. Nous voilà encore avertis des périls du terrorisme ou du populisme, ou de l'importance que nous devons accorder aux questions de génération ou de genre ou encore au sort des victimes. Ces mots-là, en effet, ne sont pas propres aux jargons des experts : ils peuplent notre quotidien de citoyens, de lecteurs de journaux, d'électeurs. Mais cette familiarité devrait nous alerter et, peut-être, nous inquiéter. Car, loin d'être le signe d'une compétence linguistique accrue offerte à chacun d'entre nous dans la compréhension et la manipulation des affaires publiques, elle témoigne de la profonde dépossession démocratique que risquent, à terme, de nous imposer certains choix lexicaux et conceptuels, qui enferment les analyses dans des alternatives simplistes et des perspectives théoriques a priori. Ce dictionnaire, réalisé par des ethnologues, des anthropologues, des politistes, des sociologues, des historiens et des archéologues européens, a donc pour ambition de décrire ce que sont réellement ces concepts apparemment familiers, ce qu'ils disent, au-delà des hommes et des contextes qui les manipulent, ce qu'ils nous obligent parfois à penser, et d'en proposer des usages enfin critiques.
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